

Est de la RDC: une semaine pour ébaucher la paix
Le Rwanda et la République démocratique du Congo (RDC) se sont donné vendredi une semaine pour ébaucher un projet d'accord de paix, après des mois d'un conflit qui a fait des milliers de morts.
Dans une déclaration signée sous l'égide des Etats-Unis, les deux Etats africains se sont engagés à respecter leur souveraineté respective et à s'abstenir de soutenir des mouvements rebelles, alors que le Rwanda est accusé d'être derrière le mouvement armé M23, qui progresse en RDC.
Donald Trump a salué "une grande nouvelle en provenance d'Afrique, où je m'occupe aussi de résoudre des guerres", sur son réseau Truth Social.
Les Etats voisins ont convenu de "créer un avant-projet d'accord de paix" d'ici le 2 mai, dans cette déclaration signée à Washington, aux côtés du secrétaire d'Etat américain Marco Rubio, par les ministres des Affaires étrangères des deux pays.
Dans une annonce surprise mercredi, le gouvernement congolais et le groupe antigouvernemental M23, qui mènent des pourparlers au Qatar, avaient publié pour la première fois une déclaration conjointe dans laquelle ils disaient vouloir "œuvrer à la conclusion d'une trêve".
L'est de la RDC, riche en ressources et frontalier du Rwanda, est en proie à des conflits depuis 30 ans, à la suite du génocide de 1994 au Rwanda. Mais la crise s'est intensifiée ces derniers mois avec la prise des grandes villes de Goma et Bukavu par le M23, soutenu par Kigali et son armée.
- Minerais en jeu -
Les deux pays reconnaissent "la souveraineté et l'intégrité territoriale de l'autre et s'engagent sur une voie permettant de régler leurs différends grâce à des moyens pacifiques, ancrés dans la diplomatie et la négociation plutôt que par un recours à la force ou à des discours hostiles", selon la déclaration de Washington.
Sans nommer le M23 explicitement, les deux capitales reconnaissent les préoccupations de l'autre et ajoutent qu'elles s'engageront "à s'abstenir de fournir un soutien militaire d'État à des groupes armés non étatiques".
Elles établiront "un mécanisme conjoint de coordination sécuritaire afin de contrer les groupes armés non-étatiques", selon la déclaration.
Le Qatar a récemment créé la surprise en s'imposant comme un nouveau médiateur dans la crise. Des pourparlers ont débuté entre Kinshasa et le M23 à Doha en avril.
La RDC a cherché parallèlement à obtenir le soutien des Etats-Unis, notamment en proposant de conclure son propre accord avec Washington sur l'accès aux minerais.
La déclaration de Washington précise que les deux parties attendent "des investissement significatifs" de la part des Etats-Unis et du secteur privé américain. Elles travailleront avec Washington dans des domaines tels que les mines et l'hydroélectricité.
- "Très fragile" -
Plus d'une demi-douzaine de cessez-le-feu et trêves ont été signés puis violés depuis fin 2021. Une myriade de groupes armés plus ou moins autonomes sont également présents dans les régions de l'Est congolais, et sont parfois utilisés par procuration par Kinshasa ou les pays voisins.
Un nouvel émissaire pour l'Afrique, l'homme d'affaires Massad Boulos, qui est aussi le beau-père d'une fille du président Trump, s'est rendu dans les deux capitales courant avril. Il a appelé le Rwanda à cesser son soutien au M23 et à retirer "toutes les troupes rwandaises du territoire de la RDC".
Dans ces conditions, Martin Ziakwau Lembisa, doctorant en relations internationales à l'Université de Kinshasa, souligne "le caractère très fragile" du rapprochement entre les deux voisins.
"Les deux parties apparemment veulent en découdre", déclare-t-il à l'AFP, ajoutant que "si ça ne dépendait que du M23 aujourd'hui, il aurait encore progressé dans son offensive".
"L'implication de l'administration américaine, quoiqu'encore timide, a contribué à exercer une certaine pression sur les parties en présence", observe-t-il.
"En signant ces déclarations, les deux parties ont simplement exprimé leur volonté de s'entendre, ceci afin de ne pas reconnaître qu'elles ne se sont pas réellement entendues à Doha", estime l'expert, également enseignant à l'université catholique du Congo.
"Jusqu'où les Américains vont-ils vraiment s'impliquer dans cette affaire, c'est là toute la problématique".
Le Rwanda n'a jamais explicitement reconnu la présence du M23 sur le sol congolais. Kigali admet toutefois des préoccupations sécuritaires le long de sa frontière avec la RDC et réclame notamment l'éradication des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), fondées par des Hutus rwandais responsables du génocide des Tutsis en 1994.
E.Rizzo--MJ